Leonore Sütterlin, espionne malgré elle

Voulez vous que je vous parle d'amour ? Monsieur X avait un curieux sourire ce soir là. J'étais en retard. Il devait m'attendre depuis un bon quart d'heure, mais il ne manifestait aucune impatience.

Dès que j'ai été installé, il a repris, un peu rêveur. Elle s'appelait Leonore, mais son nom de code était Lola. Il a répété Lola comme Lola Montes. Et puis il a ajouté de façon assez surprenante Vous savez pourquoi j'ai pensé à elle. Parce que, par hasard, j'ai entendu une chanson à la radio. Les histoires d'amour finissent toujours mal. Vous connaissez ? J'ai fait, oui. Il m'a dit encore. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai tout de suite pensé à elle. Léonore, Lola.

Lola, donc. Ou plutôt Leonore. Comme d'habitude, après avoir enregistré ce nouvel entretien avec mon interlocuteur, j'ai effectué quelques recherches afin d'infirmer ou de confirmer son récit. Et j'ai d'abord trouvé cet article du journal Le Monde paru en 1967, reprenant une dépêche de l'AFP. Je vous le lis telle quel :

'Bonn. 16 octobre. Un nouveau réseau d'espionnage travaillant au profit de l'Union soviétique vient d'être découvert au ministère fédéral allemand des Affaires étrangères. Une secrétaire dont le nom serait Leonore Sütterlin, employée depuis plusieurs années au service du personnel du ministère, son mari et trois autres personnes ont été arrêtées dans le courant de la semaine, a révélé dimanche un porte parole du ministère de l'Intérieur. Le mari de Leonore Sütterlin, photographe de presse, aurait été envoyé à Bonn par les Soviétiques avec mission d'entrer en contact avec une secrétaire ayant un poste important et de l'épouser.
Le couple aurait commencé ses activités d'espionnage en 1962. La découverte de ce réseau d'espionnage a été rendue possible grâce aux révélations faites par un agent soviétique passé au service des Américains.'