Date(s) de diffusion(s) :
17 août 2022
14 mars 1998
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Meurtre d'Aldo Moro
La lettre a été envoyée au président du Conseil Giulio Andreotti, le politicien italien qui a été six fois président du Conseil et ministre à d'innombrables reprises. Andreotti, qui a sans doute été l'homme politique italien le plus important et le plus influent de ce dernier demi-siècle. "L'inoxydable", comme on l'appelle dans son pays, mais aujourd'hui accusé d'avoir été lié à la mafia.

En 1978, il a 62 ans. Fils d'instituteur, professeur de droit pénal, profondément catholique, il adhère à la 'Démocratie chrétienne' dès 1946. Député, il ira de succès en succès et ne connaîtra jamais de défaite électorale. En 1959, après avoir occupé plusieurs fonctions gouvernementales, il est nommé secrétaire général de son parti. 'La Démocratie chrétienne' est alors divisée. La droite du parti plaide pour la formation d'un grand parti conservateur et catholique, tandis que son aile gauche préfère une alliance avec les partis laïques et surtout les socialistes. C'est de ce côté-là qu'il se situe. Il a alors 44 ans.

Moro déconcerte. Aldo Moro est une énigme. On ne sait jamais ce qu'il pense. Et comme pour mieux dissimuler ce qu'il a en tête, il aime employer des formules étranges qui déroutent autant ses amis que ses adversaires. Moreau parle de convergences parallèles, d'appuis organiques ou encore d'abstention bienveillante. Autant d'expressions qui laissent perplexes les politiciens italiens. Au reste, c'est un homme qui vit simplement, consacre beaucoup de temps à sa famille. Un homme que tout le monde s'accorde à juger, intègre, même s'il n'a jamais hésité à soutenir ses amis politiques impliqués dans des scandales.

Durant les années 60 et 70, Aldo Moro vogue de ministères en ministères. En 1974, il est président du Conseil et également président de la Démocratie chrétienne. Le pays connaît une vague sans précédent d'agitation et d'attentats. Lors des élections de 1976, le Parti communiste fait pratiquement jeu égal avec la Démocratie chrétienne. Le compromis historique est en marche, une alliance entre les deux grands partis italiens. Aldo Moro dont personne ne doute qu'il sera le prochain président de la République.

16 mars 1978. Giulio Andreotti doit être investi par la Chambre le jour même. Son gouvernement ne comprendra pas de communistes, mais sera soutenu par le puissant parti. Cette alliance a longtemps été négociée entre le président de la Démocratie chrétienne et le dirigeant communiste. C'est l'œuvre d'Aldo Moro. Et d'une certaine façon, c'est aussi, pour la première fois en Italie, l'entrée dans le jeu gouvernemental du Parti communiste. Or, c'est ce jour-là que Moro est enlevé. Et beaucoup y ont vu plus qu'une coïncidence.